Ce fameux Compte-courant Gérant, on en parle?

Intérêts fictifs sur compte courant : généralités et taux d’intérêt pour l’année 2020

Lorsqu’un administrateur emprunte de l’argent à sa société (sans contrat de prêt) ou qu’elle supporte des dépenses à caractère privé au profit de son administrateur, un compte courant à son nom est alors créé dans la comptabilité de la société.

Le « compte courant » est l’appellation utilisée pour matérialiser la créance que possède une société envers son administrateur.

Citons quelques cas concrets qui engendrent la création de ce type de compte (liste non exhaustive) :

  • Vous effectuez un virement du compte de votre société vers votre compte privé sans aucun justificatif (ce n’est pas un salaire ou un remboursement de dépenses professionnelles) ;
  • La société supporte des dépenses privées qui ne constituent pas un avantage de toute nature. Par exemple : la société paie la location de la maison de vacance de son administrateur ou elle achète une télévision qui sera installée dans le logement privé de son administrateur ;
  • Le dirigeant d’entreprise omet de déposer en banque une partie de ses recettes caisse et il apparaît que cet argent sort réellement de la caisse pour atterrir dans sa poche privée ;

En fin d’année, lors de la clôture de votre bilan, si votre expert-comptable constate l’existence d’un compte courant débiteur (vous devez de l’argent à votre société) il doit porter en compte un intérêt sur ce prêt d’argent.

Cet intérêt est soit ajouté à la créance initiale, soit déclaré comme avantage en nature à l’impôt des personnes physiques (il est donc taxé comme un revenu et soumis aux cotisations sociales).

Pour l’année de revenus 2020 (exercice d’imposition 2021), le législateur a fixé dans son arrêté royal du 24 février 2021 le taux d’intérêt à 10,20%.

Pour l’année de revenus 2019 ce dernier était de 8,78%.

Concrètement, en prenant un exemple simpliste, votre société présente au 31 décembre 2020 un compte courant en sa faveur de 20.000€. C’est la première fois que ce type d’opération est matérialisée dans vos comptes.

L’intérêt est calculé comme suit : [ (situation initiale + situation finale) /2 ] * 10,20%.

La société portera donc un intérêt en compte de : [ (0,00€ + 20.000€) /2 ] * 10,20% soit 1.020€ !

L’administrateur devra donc rembourser à sa société, au 31 décembre 2020, non pas 20.000€ mais 21.020€.

Rappelons qu’il est possible de taxer ces 1.020€ à l’impôt des personnes physiques, permettant de geler le montant à rembourser à 20.000€.

Soyez donc particulièrement vigilants à cet effet boule de neige et aux coûts générés par ce type d’opération.

Il arrive fréquemment que le dirigeant d’entreprise confonde son patrimoine privé avec celui de sa société. Le fisc décide donc, par ce taux d’intérêt élevé, de sanctionner lourdement le dirigeant d’entreprise qui ponctionnerait de l’argent de sa société sans justificatif(s).

A noter qu’il est possible de réduire le taux d’intérêt de 10,20% en rédigeant une convention de prêt entre le dirigeant d’entreprise et sa société.

Le calcul du taux d’intérêt dépend alors de la durée de remboursement et de la nature de l’emprunt (hypothécaire / véhicule / autres).

Reprenons notre exemple ci-dessus en partant du principe qu’une convention est établie et qu’un remboursement est prévu en 7 ans.

L’intérêt à porter en compte s’élèvera alors à 2,61% (pour plus de facilités nous omettons volontairement de vous présenter la formule de calcul).

L’économie engendrée est non négligeable !

Si vous vous trouviez dans une situation similaire, parlez-en sans plus attendre à votre expert-comptable.

–> Intérêts fictifs sur compte courant : et si c’était la société qui empruntait de l’argent à son dirigeant ?

Il est tout à fait concevable que pour réaliser ses projets ou pour pallier un manque de liquidités, que le dirigeant d’entreprise décide de prêter une somme d’argent à sa société.

Dès lors, le dirigeant est-il en droit d’appliquer le même taux d’intérêt que si la situation était inversée, à savoir 10,20% ? Malheureusement non.

Le fisc acceptera un taux d’intérêt de 4,06% maximum.

Outre le fait que cette différence de traitement est affligeante, une autre subtilité vient se grever à l’opération : la requalification des intérêts en dividendes.

Cette notion est régie par l’article 18 et 55 du Code des Impôts sur les Revenus.

Principes

  1. L’existence d’une créance (anciennement « prêt d’argent ») : les intérêts doivent être la contrepartie d’une créance telle que définie par le Code Civil ;
  2. L’identité du prêteur : il doit être une personne physique ayant la qualité d’actionnaire et/ou de dirigeant d’entreprise ;
  3. Le dépassement des limites. Si le taux d’intérêt dépasse le taux « normal » du marché (4,06%) et/ou si le prêt ou la somme des avances générant un intérêt dépasse la somme des réserves taxées en début de période imposable et du capital libéré à la fin de cette même période.

Un dirigeant ayant prêté une somme d’argent à sa société et ayant conclu une convention de remboursement assortie d’un taux d’intérêt, pourrait être pénalisé.

Conséquence : la société serait redevable d’un précompte mobilier de 30%, ce qui constitue un réel manque à gagner pour le prêteur.

Dans certaines situations, des aménagements peuvent être réalisés.

Ces cas de figure sont à analyser minutieusement par votre expert-comptable.